Mari Minato
- La peinture à l'épreuve du monde
Par Guitemie Maldonado - « Quels que soient les formats qu’elle investit, de la page de carnet au pan de mur, Mari Minato y dépose de la couleur, vive, parfois criarde même, dans un intriguant mélange de discrétion et d’assurance : à l’échelle du cahier ou du livre, c’est sous la forme de taches et tracés délicats qui, mêlés à l’écriture, retiennent quelque chose de ce qu’elle voit ou lit, témoignant ainsi d’une activité régulière de notation, indissociable en outre de l’attention qu’elle porte au monde ; de la feuille au mur en passant par le rouleau de papier, les plages et filaments colorés se proportionnent à leur surface d’inscription, accrochant le regard, comme ils se fixent eux-mêmes en certains points épars de l’espace, sans jamais chercher à le remplir. Car d’un support à l’autre et quoique la matière en diffère, une constante s’impose : la prédominance du blanc, celui du papier comme celui des revêtements muraux. Les couleurs y surgissent, tels des éclats, des rehauts, des ponctuations qui sont pour l’observateur autant d’échappées et de points de tension. Et dans cette dissémination de traces flottantes, se manifeste non seulement la discrétion de l’intervention, mais aussi l’assurance du geste, confiant en la puissance du signe de susciter des mondes.
- Le tremblement des signes
- Face aux traînées de couleurs dont Mari Minato parsème l’espace construit, on pense à ces taches de lumière aux bords plus ou moins nets que forme le soleil entrant dans une pièce (Edward Hopper, Soleil dans une pièce vide, 1963, collection particulière) ou perçant à travers des feuillages (Maurice Denis, Taches de soleil sur la terrasse, 1890, Musée d’Orsay), on pense aux taches colorées et d’intensité variable que les vitraux tamisent sur les pierres des églises, on pense encore à des caustiques, ces tracés mouvants produits sous certaines conditions par la réflexion et la concentration de rayons lumineux.
- (...) »
Extrait du catalogue édité par la galerie Eric Dupont , paru à l'occasion de l'exposition « Notes, entre deux fleuves » 2017, augmentée de la traduction japonaise en 2018