Shinano-ki
Livre d'artiste édité par Mari Minato
Lithographies Atelier idem paris, lettrages tamponné à la main, emboitage bois de paulownia Atelier Kamikodai, tampon au fer rouge, édition de 30 + 5 E.A., 21 x 13.5 cm (boite 16 x 23.5 x 3 cm), 2017
“Shinano-ki” représente la synthèse de mon travail de recherche sur la ville de Shinano, complété par le regard qu’a pu porter sur le monde le moine Kamo no Chômei au XIIIème siècle dans ses “Notes de ma cabane de moine” (Hôjô-ki).
Shinano Omachi est au cœur du pays de Shinano. L’installation des hommes y était conditionnée, dans ce pays de neige, à la possibilité d’y voir courir l’eau qui désaltère les êtres et nourrit les champs. Mais l’eau était également source de destruction, inondations, coulées de boues, qui obligeaient à la recherche de sa domestication, toujours éphémère.
La légende veut que Tatsunoko Tarô, le fils du Dieu-Dragon, élevé par les villageois de la région et souhaitant les remercier, ait calmé les eaux du pays. Dans la ville, le bruit de l’eau qui s’écoule est partout, il est toujours assimilé au dragon. Deux sources s’y écoulent : Otoko Mizu, venant des Alpes du nord, faisait naître des garçons aux mères qui en boivent. Onna Mizu, prenant sa source à Iyari, qui permet de mettre au monde des filles.
Aujourd’hui, la ville de Shinano est connue pour le barrage de Kurobe : une énorme infrastructure de béton dont la construction a alimenté récits et histoires valorisant la ténacité des humains face aux forces de la nature. Le paysage de la région, celle de Nagano, est en effet marqué par la présence de nombreux barrages. Ils ont fait la dynamique économique de la seconde moitié du XXème siècle. Mais de nos jours, l’automatisation a eu raison d’une population vieillissante et l’énergie qui a été déployée, la destruction des paysages naturels et la vanité humaine semblent bien dérisoires face au temps qui passe, inexorablement.
Les lithographies qui composent ce livre ont été réalisées à l’atelier idem paris en mars 2017. Ces figures sont extraites de mes carnets de dessin de Shinano. Leur origine est toujours un objet du monde concret, palpable : outils d’agriculture, tenues vestimentaires liés à la neige, ou objet de la vie de tous les jours issus de l’histoire vécue et enracinée dans la région. Résilience de peuples qui vivent en harmonie avec le monde qui les entoure. Les lignes fortes sont extraites par le dessin, et retranscrites, les rendant presque abstraites. L’œil les parcours, le cerveau les interprète, supports de la pensée, ouvrant sur le monde, elles recréent dans l’espace de ces pages tout un pan du cosmos, en un instant fugace qui vient déjà de s’écouler.